La situation, dans les hôpitaux et de manière générale dans les centres médico-sociaux, la situation est grave. En effet, au nom d’économies mettant en réalité en danger la population française (et surtout la population la plus précarisée), les conditions de travail dans ces secteurs se dégradent ainsi que l’accueil des patients. La Loi Santé (défendue par Martin Hirsch – actuel directeur général de l’Assistance publique – Hopitaux de Paris) a mis en danger dans le meilleur des cas l’ouverture des lits et le plus souvent le maintien ou l’existence des services, emplois et établissements.
Des échos désespérés récurrents nous parviennent depuis le monde sous pression de la fonction publique hospitalière. Dernièrement un infirmier s’est suicidée – en février 2017 – à l’hôpital européen Georges Pompidou tandis que d’autres personnels dénoncent fermement leurs conditions de travail. En effet, durant l’hiver, l’épidémie de grippe a révélé à quel point l’hôpital fonctionne en sur-régime et ne peut plus être en capacité d’affronter les crises. Combien de patients se sont retrouvés dans des brancards dans les couloirs des hôpitaux ? Combien ont été renvoyés à la médecine libérale ? Combien de patients sortent de manière précoce d’une hospitalisation, afin de faire des « économies » ? Notre génération connaît un avancement de l’âge de la mortalité : ce n’est pas sans raison ! La multiplication des plans d’économies empêche les plus démunis, les plus précaires de se soigner tout en accroissant le mal être au travail des personnels ! Nombre d’entre eux vivent cette situation comme un réel empêchement au travail !
Parlons également des structures médico-sociales, elles aussi touchées par les dysfonctionnements, comme la PMI (Protection maternelle et infantile) de Gennevilliers. Cette structure qui accueille les femmes et les enfants jusqu’à six ans est actuellement en danger car le département a décidé de se désengager de son financement. Le public concerné, encore une fois, est le plus précaire de ce département, qui est le plus riche de France. Paradoxe ? Non, volonté réelle d’en finir avec un service public de proximité (dans les Yvelines, le nombre de PMI est passé de 55 à 22 – chiffre de la journaliste Tania Meller, l’Humanité, 21 février 2017). Un centre de PMI joue un rôle de médecine préventive : c’est là que sont repérés les retards ou les handicaps. Le Docteur Etcheberry, dans le même article de Tania Meller, déclare : « Faute de cette politique de prévention assurée par les PMI, un nombre plus important de patients qu’on aurait pu soigner vont aller engorger le système hospitalier déjà saturé. La prévention, c’est médicalement efficace et économiquement rentable. »
Pas étonnant dans ce contexte de renvoi des PMI aux hôpitaux et des hôpitaux à la médecine libérale que 36% à 64% de la population renoncent à des soins pour des raisons financières (enquête IPSOS/SPF).
Si l’on aborde la thématique de la santé, il faut également parler de son corollaire : la Sécurité sociale. Selon Notre Santé en danger, « la loi de financement de la Sécu pour 2015-2017 a diminué le budget de la santé de 10 milliards d’euros en faveur du Pacte de responsabilité, dont 3,5 milliards à l’Hôpital, soit 22 000 postes en moins d’ici la fin de cette année. » Ce qui est aux antipodes de l’histoire de la création de la Sécurité sociale, comme on le voit dans le magnifique et nécessaire documentaire de Gilles Perret : La Sociale. Ce film montre bien que le maître-mot de ce formidable outil de protection est « chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ». Sans solidarité, pas de santé publique !
Le désengagement de l’État des services publics, comme dans l’Éducation nationale, n’a jamais produit que des inégalités et de la colère. Nous sommes malheureusement dans une conjoncture telle que certains récupèrent ce désespoir, pour en extraire les politiques les plus réactionnaires et les moins solidaires.
Le SNICS-FSU – en lien avec d’autres organisations signataires – demande que soient prises en compte les évolutions des champs de compétences de tous les secteurs de la profession d’infirmier par la reconnaissance d’un diplôme de licence en sciences infirmières. Qu’un vrai travail de reconnaissance universitaire soit attribué à toutes les spécialités infirmières par un diplôme de master ainsi que pour certains secteurs singuliers tels que ceux de la psychiatrie, de la santé au travail et de l’éducation nationale.
Malgré les annonces de la stratégie d’amélioration de la Qualité de Vie au Travail présentée en décembre par la ministre, la réalité du terrain nous rappelle qu’aucune amélioration n’est réellement envisagée dans cette stratégie et que le malaise soignant demeure préoccupant. L’exigence de moyens pour garantir la qualité et la sécurité des soins est une des revendications phare de ce mouvement.
Il paraît difficile d’envisager une amélioration lorsque la stratégie présentée par Marisol TOURAINE précise que « 30 millions d’euros seront consacrés sur trois ans à la généralisation d’équipes pluridisciplinaires » tandis que l’Objectif National des Dépenses de Santé (ONDAM) impose des milliards d’économie aux établissements ? En 2016, les économies drastiques ont induit l’inacceptable. Les soignants sont contraints à exercer en inadéquation avec leurs valeurs, ils expriment leurs souffrances : comment accepter que la réponse serait de poursuivre cette ligne économique ? Comment, en conscience, pourrions-nous cautionner ce choix et nous taire alors que tant de vies sont en jeu ?
Pire, le projet de transposition du droit européen pour permettre l’exercice partiel de nos professions réglementées fait courir le risque d’une déqualification de la sécurité des soins pour les usagers.
Aux conditions de travail dégradées et au mal être soignant, viennent s’ajouter les promesses récurrentes de reprendre la réingénierie des formations des infirmiers de blocs opératoires et des infirmières puéricultrices sans jamais en préciser les modalités, les échéances ni prendre position pour une reconnaissance au niveau Master. De plus, aucune valorisation financière des compétences et des responsabilités n’est actée. Il en est de même, pour la profession IADE, déjà reconnue au grade de Master et dont les revendications ne sont toujours pas abouties.
La reconnaissance financière de nos exercices en adéquation avec nos niveaux d’études, de compétences et de responsabilités est pourtant une demande légitime. Il convient de définir rapidement la reconnaissance statutaire et indiciaire pour tous les infirmiers en soins généraux, infirmiers anesthésistes, infirmiers de blocs opératoires, infirmières puéricultrices et cadres de santé (Grille A type fonction publique). Il est par ailleurs nécessaire d’augmenter les compensations financières des contraintes imposées par nos exercices (prime de nuit et de week-end). Si, sur ce point, le cabinet de la ministre annonce une concertation, la date n’est pas encore connue.
Une reconnaissance de la pénibilité de la profession, avec une bonification pour la retraite, est indispensable dans tous les secteurs (public, privé, libéral).
Les revendications et les attentes sont clairement objectivées pour la profession comme pour les usagers. Étudiants et professionnels souhaitent être entendus et reconnus pour garantir la sécurité des usagers. Il appartient donc à madame Marisol TOURAINE d’apporter des réponses concrètes pour sécuriser la prise en charge des patients, patients que nous sommes tous appelés à devenir un jour…
Les fonctionnaires, pour une population éduquée et en bonne santé, nous en avons besoin. C’est vital !