Arrêt du harcèlement dont les Roms sont victimes !

Au moment où nous rédigions cette note est survenue l’affaire de Marseille avec ce que l’on peut appeler le premier pogrom anti-roms et la première manifestation des habitants des environs de Lille, à Cysoing, contre la présence des Roms dans leur commune. La responsabilité du gouvernement est d’autant plus grande qu’il a agi tout l’été avec fermeté, en contradiction avec la circulaire du 26 août 2012.

Les Roms vivent aujourd’hui une situation qu’ils estiment "discriminante et arbitraire » suivant les mots du président de l’association Romeurope. La restriction de l’article 39 du traité de Rome leur interdit finalement de pouvoir travailler en France.

De plus, les Roms réclament de pouvoir inscrire leurs enfants dans les écoles les plus proches de leur lieu d’habitation. L’obligation scolaire et le droit à l’instruction scolaire doivent primés sur tout le reste. Trois circulaires ont été envoyées début septembre aux recteurs rappelant que l’on"vise à favoriser la fréquentation régulière d’un établissement scolaire dès l’école maternelle, à améliorer la scolarité des élèves issus de familles itinérantes et de voyageurs". La seconde rappelle l’obligation d’accueil dans les établissements et les écoles. La troisième circulaire"vise à définir les missions et l’organisation des Casnav", les Centres académiques pour la scolarisation des nouveaux arrivants et des enfants du voyage créés en 2002, héritiers de CEFISEM (Centres de formation et d’information pour la scolarisation des enfants de migrants). Les associations de défense des Roms demandent qu’un moratoire sur l’expulsion des Roms soit pris immédiatement par le gouvernement car sans stabilité, il est impossible de pouvoir scolariser ces enfants. De nombreux maires prétextent surtout de l’imminence d’une expulsion pour ne pas inscrire les enfants.

Ce traitement en en totale contradiction avec les principes de la République et de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. La FSU 95 s’ oppose au harcèlement dont sont victimes l’ensemble de la diaspora Roms. Nous réclamons le droit à la scolarisation pour tous les enfants sur le territoire français et des conditions de vie décentes pour toutes les familles avec un accès aux soins et à la protection sociale. Il faut aussi la levée des mesures transitoires afin de leur permettre un accès au travail.

Val d’Oise : jeudi 20 septembre, une compagnie de CRS est venue expulser 200 Roms qui s’étaient installés au Val de Liesse à Saint-Ouen l’Aumône depuis 2011 sur une terre agricole. Cette opération menée à l’aube était coordonnée au niveau de l’Ile-de-France puisque trois autres camps étaient aussi délogés à Champs-sur-Marne, Chelles et Bussy-Saint-George.

Les autorités ont expliqué à la presse que ces camps étaient : « dans des situations sanitaires et d’hygiène extrêmement limites, à la fois pour les personnes elles-mêmes et les populations vivant aux environs. ». Immédiatement, les ONG françaises et les Nations Unies ont critiqués très vivement ces expulsions en expliquant que la politique menée par le précédent gouvernement de Nicolas Sarkozy était aujourd’hui la même que celle du gouvernement Hollande via son ministre de l’Intérieur, Manuel Valls. De nombreux Roms expulsés étaient suivis médicalement dont certains ont des maladies graves et dont personne ne sait à l’heure qu’il est où ils se trouvent.

Les Roms sont aujourd’hui entre 15 000 et 20 000 en France (la moitié en région parisienne, le quart en Seine-Saint-Denis) soit beaucoup moins qu’en Espagne ou en Italie.

La situation des Roms de France a toujours été difficile. De 1912 à 1969, les Roms devaient se munir d’un « carnet anthropométrique d’identité » afin de pouvoir circuler. Cette législation appliquait une loi d’exception inique rejetant cette catégorie de personnes hors du droit commun et fondée sur un critère racial. Aujourd’hui encore, même si cette loi a disparu, il n’en reste pas moins qu’il existe toujours un "Livret de circulation". Cette pratique remonte de fait à une ancienne tendance de l’Etat français, sous l’Ancien Régime, qui visait à contrôler le nomadisme et le vagabondage.

L ‘entrée de la Roumanie dans l’Europe en 2007 a permis à de nombreux Roms d’entrer en France n’ayant plus besoin de visa. Cependant, les ressortissants Bulgares et Roumains ne seront bénéficiaires du principe de libre circulation qu’en 2014. C’est pourquoi, entre 2007 et 2010, environ 10 000 Roms ont été expulsés chaque année. Le coût de ces opérations très médiatisées s’élèvent à environ 250 millions d’euros. Le parlement européen est ainsi intervenu le 9 septembre 2010 en demandant la suspension de ces retours forcés après que Nicolas Sarkozy en ait fait son cheval de bataille avant les présidentielles.

A l’époque, le député PS, Jean-Jacques Urvoas, dénonçait la recherche de boucs émissaires, tout en affirmant que le Président de l’époque devait être un « rassembleur ».

Pourtant, avec la publication de la circulaire du 26 août 2012, les associations de Roms avaient applaudi le courage du nouveau gouvernement qui prenait des dispositions prenant en compte un ensemble de facteurs, notamment éducatifs et sociaux, incluant recherche de solutions concernant le logement en hébergement d’urgence et l’accès au travail. Or, on assiste a une certaine « improvisation », pétrie certes de bons sentiments mais qui au bout du compte renvoi de toute façon cette population au nomadisme. On voit mal dans ces expulsions ce qu’il en est des termes mêmes de la circulaire proposant d’ "anticiper et d’accompagner".

Comme le disait une circulaire du Parti Socialiste du 4 octobre 2011 : « Il est temps aujourd’hui de sortir d’une logique d’exclusion pour mettre en œuvre une véritable politique d’intégration de ces populations. » On attend donc des paroles aux actes !



Thierry Thibault