Le mercredi 8 mars 2017 est une journée importante pour les droits des femmes dans le contexte actuel. En effet, entre une Amérique aux mains d’un phallocrate, l’affaire Baupin classée sans suite, les inégalités salariales toujours à 26% et la mort d’une femme tous les trois jours sous les coups de son compagnon ou époux, les combats féministes n’en finissent pas. L’histoire se joue de nous et si nous pensions que les femmes étaient à l’abri de toute régression, nous nous trompions : non, un droit acquis n’est pas un droit éternel.
Ce combat vigilant, acharné et toujours recommencé est celui que partage, avec toutes les féministes progressistes, la sociologue Christine Delphy. L’association Les mots sont importants, de la sociologue Sylvie Tissot et du philosophe Pierre Tevanian, a sorti un film, puis un DVD autour de cette figure capitale du féminisme du XXème et XXIème siècles : Je ne suis pas féministe, mais… Ce documentaire d’une cinquantaine de minutes réalisé par Sylvie Tissot et Florence Tissot présente Christine Delphy en plusieurs tableaux : l’enfance, la construction politique (MLF, FHAR – Front homosexuel d’action révolutionnaire), le parcours en tant que sociologue, les combats actuels. L’approche documentaire se fait par un dialogue avec Ch. Delphy, dans sa maison de campagne. On voit Sylvie Tissot l’interroger, l’accompagner en promenade, découvrir avec elle les images du film Un racisme à peine voilé, ou encore commenter les photographies de son enfance. L’approche est très respectueuse de son intimité et sa pensée, fondée sur une approche matérialiste. C’est pourquoi la sociologue avait manifesté contre l’interdiction du port du voile à l’école en 2004. En effet, elle y voyait avant tout un attaque anti-féministe puisqu’elle empêcherait des élèves d’être scolarisées tout en considérant encore une fois une femme ou une jeune femme comme une mineure incapable de décider librement de ce qu’elle veut. Elle rappelle alors que la laïcité est une neutralité appliquée aux enseignants et pas aux élèves. Des moments très touchants interviennent au milieu des prises de position politique, comme celui où elle raconte sa prise de conscience féministe (son père restait à lire le journal le midi, tandis que sa mère préparait le repas !), ou encore les difficultés rencontrées en tant que lesbienne dans le monde universitaire ou sur le plan amoureux avant mai 1968. La force de son propos vient également d’affirmations malicieuses mettant en lumière les rapports de force à l’œuvre dans le combat féministe : oui, les hommes y perdront en avantages ce que tous et toutes nous gagneront en égalité…
Citons enfin Sylvie Tissot : « Parmi les nombreuses motivations à l’origine de ce film, il y a l’espoir de renouveler pour d’autres ce miracle de l’émancipation politique quand tout, a priori, nous incite à l’inaction. » (http://lmsi.net/D-comme-Delphy)
Le DVD offre également un « Abécédaire », comme un pendant féminin et féministe à celui de Gilles Deleuze. 3h40 pour aborder des thèmes variés : IVG, genre, harcèlement, Simone de Beauvoir, libéralisme, kilo, non-mixité etc.
Plus d’informations sur le DVD et propos de Sylvie Tissot à propos de son film : http://lmsi.net/D-comme-Delphy